contre l’école de Beslan. Le président a prétendu que la loi améliorerait le contrôle du pays et renforcerait la lutte contre le terrorisme.

L’opinion de l’élite politique russe est partagée. La majorité des gouverneurs et des présidents des républiques soutiennent l’initiative de Poutine. Au sud de l’Oural, Murtaza Rakhimov, président du Bachkortostan, a ainsi affirmé : « Nous soutenons fermement et inconditionnellement les mesures prises par le président russe dans le but de préserver la sécurité de notre pays et de ses citoyens et de favoriser une meilleure administration del’État à tous les niveaux » (Nezavisimaya Gazeta, 8 octobre 2004). De son côté, le représentant de l’opposition, Aleksander Ivanchenko, ancien président de la Commission électorale centrale de Russie, s’oppose à cette loi : « La nomination des dirigeants régionaux est une violation de la Constitution, qui instaure en Russie à la fois un régime républicain et démocratique et une organisation fédérale des pouvoirs del’État » (Nezavisimaya Gazeta, 30 octobre 2004).

Les 89 unités constituantes de la Russie

La Constitution de la Fédération de Russie de 1993 définit le pays comme un État fédéral composé de 89 unités constituantes, appelées en russe « sujets de la Fédération » :

Vladimir N. Lysenko est vice-président du Parti républicain de Russie.Il a été membre du Soviet d’État russe puis de la Douma russe (19902003) où il a occupé, de 1996 à 2003, la fonction de président de la Commission des affaires de la Fédération et de la politique régionale.

Les assemblées législatives des régions ont transmis à la Doumad’État plus de 70 prises de position touchant à ce texte. Une seule, celle de l’oblast de Mourmansk, s’élevait contre le projet de Poutine. Les autres parlements régionaux ont soutenu l’idée, mais toutes les régions se sont néanmoins fermement opposées à la dissolution des assemblés législatives régionales au cas où celles-ci refuseraient de plébisciter un candidat proposé par le président.

L’opposition la plus virulente est venue de l’opinion publique russe et de l’étranger. Selon un sondage réalisé par VZIOM (le plus ancien centre de recherche indépendant sur l’opinion publique, dirigé par le sociologue Yuri Levada), 52 pour cent des Russes interrogés se sont prononcés en faveur de l’élection des gouverneurs, contre 28 pour cent en faveur de leur désignation. Le 10 décembre, Giovanni di Stasi, président du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe, a exprimé les craintes de ce dernier : l’instauration d’une procédure facilitant la dissolution des parlements régionaux risque de fragiliser la structure fédérale de la Russie. Le président américain George W. Bush, bon nombre de dirigeants européens et l’opinion publique de la plupart des pays européens ont également critiqué cette loi.

Une atteinte au droit?

Un groupe d’éminents juristes russes et de défenseurs des droits de la personne a porté l’affaire devant la Cour constitutionnelle de la Fédération de Russie. Ces juristes et autres spécialistes en la matière espèrent bien que celle-ci déclarera inconstitutionnelle la proposition de Poutine. Pourtant, en dépit de l’opposition qui s’exprime tant à l’intérieur qu’à l’extérieur des frontières, le président Poutine semble inébranlable. Il envisage même de présenter une procédure similaire pour la désignation des maires des grandes villes, qui seraient nommés à leur tour par les gouverneurs choisis par Poutine.

Fédérations vol. 4, no 3 / mars 2005

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