Une province canadienne rejette la charia

La charia va-t-elle à l’encontre de la Charte des droits et libertés ?

DaltonMcGuinty, premier ministre de la province canadienne de l’Ontario, a rejeté l’idée que la charia, la loi islamique, soit légalement reconnue comme un processus de médiation des conflits familiaux dans la province. Il a dit craindre que les tribunaux d’arbitrage religieux en viennent à « mettre en péril nos lois communes ».

Selon la charia, les femmes divorcées cessent de recevoir une pension alimentaire après trois mois et les hommes obtiennent la majorité des biens du couple ainsi que la garde des enfants.

Les tribunaux religieux existent en Ontario depuis que la Loi de 1991 sur l’arbitrage a donné aux chefs religieux le droit d’arbitrer des questions civiles telles que le divorce, les successions, les différends liés aux biens patrimoniaux et la garde des enfants.

En 2003, la Canadian Society of Muslims a demandé l’instauration d’un tribunal en bonne et due forme dont les décisions, basées sur la loi islamique, auraient force exécutoire. Cette demande a été critiquée par ceux qui considèrent que la charia va à l’encontre de la Charte canadienne des droits et libertés, ainsi que par ceux qui s’inquiètent de la façon dont la loi islamique serait interprétée au Canada.

Les partisans d’un tribunal de la famille basé sur la charia insistent sur le fait que les participants choisissent librement l’arbitrage religieux et que les hommes comme les femmes peuvent en appeler des décisions à un tribunal civil.

L’ex-procureure générale Marion Boyd a été mandatée par le gouvernement de l’Ontario pour réexaminer la Loi de 1991 sur l’arbitrage et n’a trouvé aucun élément discriminatoire à l’égard des femmes dans l’arbitrage religieux. En réponse aux allégations de discrimination, M. McGuinty a tout de même promis d’interdire toute forme d’arbitrage religieux. Les tribunaux catholiques et juifs seront donc également interdits dans la province.

Si le gouvernement avait fait suite à la demande de la Canadian Society of Muslims, l’Ontario serait devenue le premier gouvernement occidental à reconnaître la charia.

Forum des fédérations

Fédérations vol. 5, no 1 / novembre 2005