Conférence internationale sur le fédéralisme

Mont-Tremblant, octobre 1999

Séance 4E) Table ronde sur les RIG : Structures des institutions intergouvernementales QUELQUES IDÉES POUR AMORCER LE DÉBAT Uwe Leonardy Ancien chef de la Division constitutionnelle, Mission de la Basse-Saxe auprès de la Fédération, Allemagne

L’objectif premier des tables rondes est de permettre à tous les participants de soulever les questions qui les touchent le plus et de les soumettre à un débat. Comme nous ne cherchons ni conclusion ni solution précises, nous n’avons pas à nous astreindre à un ordre du jour. Toutefois, pour que le niveau de débat soit relativement comparable dans les trois tables rondes sur les relations intergouvernementales (RIG), il convient de garder en tête les points notés par le professeur Cameron à la fin de son article de référence. (Tous les participants devraient l’avoir reçu.) Dans la perspective de ces considérations, les questions suivantes serviront peut-être à guider nos débats.

I

Pour l’échange de notre expérience pratique sur la situation dans les structures des RIG et leurs principales faiblesses, serait-il juste de dire 1. que l’identification du problème pratique le plus urgent diffère beaucoup entre les fédérations bien établies et les nouvelles fédérations (y compris celles à venir)? Est-il vrai que, dans les fédérations bien établies, la constante multiplication des institutions intergouvernementales rend la gestion et la transparence de plus en plus difficiles, alors que les nouvelles fédérations sont marquées par des processus intergouvernementaux plus ou moins « sans rapport les uns avec les autres » (David Cameron), qui non seulement manquent de concepts structuraux mais aussi de compétences humaines suffisamment qualifiées pour le développement d’institutions? 2. que le résultat le plus évident des dernières réalisations correspond à cette image? Partageons-nous l’avis que, dans les fédérations « classiques », la crainte du chevauchement et de la confusion, combinée au désir d’un « État maigre », a entraîné des décisions qui visent à une concentration des nombres, ainsi qu’une organisation plus hiérarchisée? Les besoins en concepts et en personnel dans les autres groupes d’États fédéraux semblent-ils encourager une plus grande perspicacité quant à la nécessité de faire appel à une expérience organisée (et, en particulier, comparative) en tant que réalisation la plus marquante pour leurs structures intergouvernementales en émergence? 3. que la définition des concepts non seulement organisationnels, mais aussi légaux, et même, dans certains cas, constitutionnels, pour la participation d’entités fédérées dans les arènes du pouvoir international ou supranational a été la plus importante innovation moderne des États de type fédéral dans le monde? Les structures de ce genre dans le domaine supranational se rapprochent-elles d’un niveau comparable de perfection dans les fédérations bien établies et les nouvelles fédérations? Dans le domaine des relations internationales, les aspirations des nouvelles fédérations sont-elles encore plus grandes que celles de certaines fédérations déjà « établies »? Les États fédéraux ont-ils donné suffisamment de visibilité au phénomène des « souverainetés perforées » (Ivo Duchacek), qui reflète les exemples de « glocalisation » (Tom Courchène) à l’échelle mondiale, autant au niveau de la conscience politique qu’à celui du développement économique?

II

Dans notre évaluation des structures intergouvernementales et de leurs effets, 1. en termes généraux, peut-on évaluer si la relation entre intrants-coûts et extrants-valeur est appropriée? Ou est-ce que les seuls énoncés possibles ici sont les suivants : - que toute renonciation, pour raisons financières, aux relations intergouvernementales dans leur ensemble produirait un système fédéral ingouvernable, et entraînerait, par conséquent, des coûts beaucoup plus élevés que ne le feraient même les structures intergouvernementales les plus dispendieuses et - que le besoin d’équilibrer coûts et valeur reflète les problèmes énumérés à la section I.1? 2. de telles observations s’appliquent-elles à l’examen de l’efficacité intergouvernementale dans le sens où, plus grande est la gamme de services que le citoyen d’une fédération s’attend à recevoir de l’État, plus les structures intergouvernementales deviennent complexes? Est-ce que cela entraîne un haut degré correspondant de discipline dans l’organisation et d’expertise dans la performance, en écho aux problèmes énumérés à la section I.2? 3. le conflit de valeurs le plus frappant est-il peut-être celui qui existe entre l’efficacité et l’utilité des relations intergouvernementales d’une part, et, de l’autre, les demandes d’une transparence démocratique de la responsabilité? Est-ce que la structure intergouvernementale même la plus efficace et la plus utile n’aura pas tendance, en fin de compte, à nuire à l’esprit politique d’une fédération et à son potentiel de convaincre l’électorat, si l’on accepte le fait quasi-incontestable qu’en termes quantitatifs, la plupart des décisions dans les relations intergouvernementales doivent être prises à huis clos? Si c’est le cas, les régimes fédéraux devraient-ils alors prévoir des « fenêtres sur les relations intergouvernementales » (Uwe Leonardy), à travers lesquelles le grand public serait informé, ou pourrait s’informer lui-même, de ce qui se passe et des décisions ou accords qui vont être ou ont été pris. Le développement d’instruments procéduraux ou institutionnels à cet effet ne devrait-il pas retenir davantage l’attention dans la pratique des fédérations qu’il ne l’a fait jusqu’à présent? Ces instruments pourraient-ils être, par exemple (puisque quelques États fédéraux en ont déjà) : - des deuxièmes chambres qui reflètent une bonne partie des processus intergouvernementaux (comme le Bundesrat allemand)? - de plus grands efforts d’interaction entre les comités inter-exécutifs et parlementaires (comme en Australie)? - l’encouragement d’une plus grande coopération entre les institutions interparlementaires (comme dans l’Union européenne)? - des communiqués de presse ou des conférences de presse à intervalles réguliers après les réunions importantes des institutions intergouvernementales? - la publication officielle des décisions ou des accords en temps opportun (sauf exception, lorsque cela pourrait s’avérer nuisible à de nécessaires négociations subséquentes)? - et peut-être d’autres mesures ou étapes appropriées, que la table ronde pourrait demander, en termes généraux, au Forum d’exploiter plus en profondeur?

III

Quant à « l'apparition de concurrents sérieux sur le marché de la gestion publique » (David Cameron), on a déjà abordé, à la section I.3, le fait que les relations intergouvernementales dans les fédérations doivent se rattacher aux centres de pouvoir qui leur sont supérieurs. Est-il juste de dire que le domaine le plus important, c’est-à-dire celui où elles doivent ou devront agir de la même manière avec les centres qui leur sont égaux ou inférieurs, semble être celui des institutions économiques et sociales? Est-il possible que ce principe soit d’autant plus pertinent à mesure que progressent les effets de la mondialisation, qui semblent rendre encore plus évident le fait que l’État moderne perdra progressivement son pouvoir sur le développement économique et les effets sociaux qui en découlent s’il ne se soucie pas suffisamment de créer des structures et des procédures d’échanges concertés avec les forces économiques et sociales? Devrait-on étudier plus sérieusement les modèles d’échanges de ce genre (comme le Conseil économique et social de l’Union européenne, ou ce que les Allemands appelaient « L’action concertée »)? Et, en ce qui concerne les fédérations, comment peut-on s’assurer que les unités constituantes auront un rôle approprié à jouer dans de tels modèles? Voilà assez d’idées pour amorcer le débat. Inutile de dire que votre modérateur accueillera et ajoutera avec plaisir toute autre idée qui pourrait vous sembler également ou plus pertinente.

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