Les États-Unis d’Amérique

G. ALAN TARR

Les États-Unis d'Amérique incarnent la plus vieille démocratie fédérale des temps modernes encore en vigueur. En effet, les auteurs de la Constitution américaine sont unanimement considérés comme les créateurs du fédéralisme moderne, par opposition aux formes anciennes du fédéralisme, plus particulièrement le confédéralisme. Cette Constitution a été influente en tant que modèle de démocratie fédérale et ses principes-clés tels que le fédéralisme, la séparation des pouvoirs, un système judiciaire indépendant et les droits de la personne sont reconnus dans le monde entier. Les Américains considèrent que le succès de la nation est principalement dû au discernement des rédacteurs de ce document. Pourtant, tant la Constitution que le type de gouvernement fédéral qu'elle a généré ne sont plus les mêmes qu’à l’origine. Les modifications adoptées après la Guerre civile (1861-65) ont modifié l'équilibre fédéral-étatique, et l'autorisation de prélever un impôt fédéral sur les revenus, prévue dans le Seizième amendement (1913), a considérablement augmenté le pouvoir fiscal du gouvernement fédéral. La Constitution a également influencé et été influencée par les développements politiques et sociaux : de quelques États situés sur la côte atlantique, les États-Unis sont devenus une véritable nation continentale et, d'un pays récemment libéré d'un régime colonial, ils se sont transformés en une superpuissance économique et militaire.

Les États-Unis comprennent actuellement 50 États, un district fédéral (Washington, DC) qui officie en tant que capitale, 11 territoires insulaires (par exemple, Guam et Puerto Rico), et environ 600 tribus américaines autochtones reconnues

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fédéralement et ayant le statut de « nations autochtones dépendantes ». Le pays traverse le continent nord-américain d'est en ouest et comprend également l'Alaska et Hawaï, lesquels ne sont pas adjacents aux 48 autres États et ont été les derniers à adhérer à l’union en 1959. Avec une population de 291 millions en 2003, un territoire de 9 629 091 kilomètres carrés, et un produit national brut par habitant de 36 200 $, les États-Unis d'aujourd'hui sont bien différents des 13 États d’origine, qui, alors composés de 2,5 millions d’habitants, ont déclaré l'indépendance à la Grande-Bretagne en 1776. La population s’est également transformée sur le plan ethnique. En 1776, environ deux tiers des Américains étaient Anglais, Gallois, et Écossais, les Allemands représentaient environ 9 pour cent de la population et les esclaves d’origine africaine à peu près 17 pour cent. La population actuelle reflète l'immigration massive de personnes en provenance de l’Europe au cours des dixneuvième et vingtième siècles et, surtout à la fin du vingtième siècle, dAmérique latine et dAsie. En 2002, la population des États-Unis était afro-américaine à 12,2 pour cent, d'origine hispanique à 13,4 pour cent, et d'origine asiatique à 3,9 pour cent. L'anglais est la langue nationale de facto, car la Constitution américaine ne mentionne pas de langue officielle.

La population reste à prédominance chrétienne et protestante bien que l'immigration ait augmenté la diversité religieuse. Les Américains sont pour la séparation de l’Église et de l’État, tout en étant également fortement religieux. Cette religiosité se reflète dans les conflits virulents qui surgissent régulièrement au sujet de questions morales telles que l’avortement. Cependant, les principales instances religieuses du pays soutiennent, d’une manière générale, le constitutionnalisme, la démocratie, et les droits. Les grands mouvements sociaux qui ont permis l’avancement des droits, notamment l'abolition de l'esclavage et la révolution des droits civils dans les années 60 grâce au révérend Martin Luther King fils, Ph. D., ont été conduits par des chefs religieux. Quand bien même l'individualisme libéral a joué un rôle très important dans la vie américaine, il en va de même du communautarisme : à savoir le besoin de la population d'établir et de maintenir des communautés, en particulier des communautés locales qui reflètent leurs croyances et leurs préférences, ainsi que le besoin d’avoir recours au gouvernement, notamment aux gouvernements d’État et locaux, pour tempérer les excès de l'individualisme libéral.

LA CREATION DE LA CONSTITUTION FEDERALE

La présente Constitution des États-Unis est la seconde adoptée au pays; elle fut rédigée en 1787 afin de remplacer les Articles de la confédération de 1781, un texte de peu de portée. Conformément à ceux-ci, chaque État avait une voix égale au Congrès, et les délégations étatiques pouvaient être rappelées par les législatifs des États. Par conséquent, les représentants défendaient surtout les intérêts de leur État. Ces Articles limitaient le gouvernement confédéral à quelques compétences spécifiques (par exemple, la guerre et les affaires étrangères); ils ne lui octroyaient aucun contrôle sur les affaires internes des États. Fait marquant, le gouvernement confédéral n’exerçait aucune autorité directe sur les États ou sur les citoyens; il ne pouvait pas imposer, ni enrôler les citoyens, ni les soumettre à ses lois (aux règlements économiques, par exemple). En conséquence, les États pouvaient ignorer les mandats et les demandes de financement du gouvernement confédéral, ce dont ils ne se privaient pas. L'absence d’une autorité nationale appropriée confinait les États-Unis au « dernier stade de l’humiliation nationale » 2, selon les termes d'Alexander Hamilton.

Les problèmes qui surgirent au sein des États donnèrent également l’impulsion pour une nouvelle constitution. La plupart des premières constitutions d'État concentraient le pouvoir de gouvernance dans le législatif et soumettaient les législateurs à des élections annuelles. L'absence de système de poids et de contrepoids et le fait que l’enthousiasme populaire ne pouvait être contrôlé favorisèrent les abus (par exemple, des lois libérant des débiteurs de leurs dettes ou leur permettant de payer leurs dettes avec du papier-monnaie sans valeur). Ce sont des exemples que James Madison qualifia de tyrannie de la majorité en politique

démocratique.3 En outre, la concurrence commerciale entre les États engendra une prolifération de barrières commerciales destinées à protéger les producteurs locaux de la concurrence d'autres États, ce qui entraîna la stagnation de l'économie et des conflits entre les États.

L'assemblée qui s'est réunie à Philadelphie en 1787 fut chargée par le Congrès confédéral de proposer des modifications aux Articles de la Confédération, mais la plupart des 55 délégués décidèrent que seule une nouvelle constitution, basée sur différents principes, pourrait résoudre les problèmes du pays. Les délégués proposèrent un système qui reprenait les éléments du gouvernement confédéral et ceux du gouvernement unitaire ou, selon Madison, les principes « fédéraux » et

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« nationaux ».Les délégués cherchèrent à augmenter le pouvoir fédéral, tout en se protégeant de la tyrannie, afin de préserver la liberté individuelle (dont les droits de propriété), de favoriser la prospérité commerciale (par exemple, par le libreéchange), de garantir la paix nationale et d’améliorer la défense nationale. Les limites constitutionnelles imposées aux compétences fédérales et étatiques servirent également à faire avancer les objectifs des rédacteurs de la Constitution, de même que les quelques conditions imposées aux États. La liberté individuelle était garantie par des droits clés inclus dans la Constitution, tels que le droit d’être jugé par un jury, mais plus encore par les limites constitutionnelles imposées aux compétences du gouvernement fédéral, par l'obligation de ce dernier de rendre des comptes à la population, et par la disposition réservant les compétences liées aux

services de police aux États.5

Outre « l’institution singulière » que constituait l'esclavage dans le sud du pays, les auteurs ne se sont pas préoccupés de régler les questions territoriales liées à la diversité linguistique, ethnique ou religieuse, même si la protection des droits individuels des personnes ayant des identités linguistiques, ethniques et religieuses diverses était très importante pour eux. La lettre que le président George Washington adressa en 1790 à une congrégation juive de la ville de New York garantissant aux juifs des États-Unis une protection et une terre d’asile est un

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parfait exemple de cette politique de tolérance.

De plus, les exigences constitutionnelles selon lesquelles, d’une part, les membres de la Chambre des représentants doivent avoir au moins 25 ans et être « citoyens des États-Unis depuis au moins 7 ans » et, d’autre part, les membres du Sénat doivent avoir au moins 30 ans et être « citoyens depuis au moins 9 ans », garantissent que le corps législatif de l’union fédérale soit ouvert aux immigrés ayant obtenus la

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citoyenneté américaine.En revanche, à l’exception de l'interdiction constitutionnelle que la religion soit un critère de sélection des fonctionnaires fédéraux, la Constitution ne mentionne ni la langue, ni la culture, ni l’appartenance

ethnique, ni la religion.8 L’autorité dans ces matières était réservée aux États ou, implicitement, à la sphère privée. Ainsi, le serment du président que l’on trouve à l’article II, section 1, oblige celui-ci à « protéger et défendre la Constitution » et non le peuple américain, la nation ou l’État-nation.

Parmi les plus importantes nouvelles compétences fédérales figurent les compétences d’imposer, de réglementer le commerce interétatique et international, de créer une armée de terre et une armée de mer, et d'assujettir le peuple aux lois fédérales. Contrairement aux Articles cités plus haut, la Constitution accordait également au Congrès des compétences implicites, à savoir le pouvoir d’édicter les lois « nécessaires et appropriées » à l'application de compétences expressément déléguées. Comme conséquence de ces nouvelles compétences générales et conformément au slogan de la révolution américaine, « pas de taxation sans représentation, » la Constitution rendit tous les fonctionnaires fédéraux soit directement soit indirectement responsables devant le peuple. En outre, elle institua le système des poids et contrepoids ainsi que la séparation des pouvoirs, et elle continua à répartir le pouvoir entre le gouvernement national et celui des États. Il sied également de souligner que la Constitution américaine n’accorde au gouvernement fédéral que des compétences limitées et déléguées. Puisque toutes les compétences appartiennent à l'origine aux peuples souverains des États constituants, ceux-ci et leurs États conservèrent toutes les compétences qu'ils n’ont pas octroyées au nouveau gouvernement fédéral. Ainsi, bien que la Constitution interdise quelques compétences étatiques, elle ne délègue pas de compétences aux États, et elle ne contient pas non plus de liste de compétences que les États partagent avec le gouvernement fédéral.

La Constitution chercha à traiter des problèmes posés par la rivalité interétatique et par la tyrannie de la majorité au sein des États en déléguant certaines compétences au gouvernement fédéral, y compris les compétences d'établir des règles uniformes sur la faillite, la frappe de la monnaie, la réglementation du commerce entre les États, et l’emprunt d’argent. Elle a également interdit aux États de frapper de la monnaie, d’édicter des lois réduisant les obligations contractuelles, ou d’imposer des taxes sur les importations ou les exportations, « excepté ce qui doit être absolument nécessaire à l’exécution de [ leurs ] lois de contrôle » (Art. I, section 9). Les délégués pensaient pouvoir confier au gouvernement fédéral des compétences accrues parce que, avec son système de poids et de contrepoids, il était mieux armé que les gouvernements d'État et, ainsi, moins facile à tyranniser. En outre, selon les arguments de Madison, une faction majoritaire (tyrannie) a tendance à prendre de l’ampleur au sein de petites sociétés politiques homogènes, où un seul groupe est susceptible de dominer. En revanche, en étant une république commerciale étendue avec une multiplicité de groupes, le gouvernement fédéral est moins enclin à

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favoriser la formation de factions majoritaires.

En outre, dans la perspective d’étendre le pays, la Constitution prévoit l'admission de nouveaux États à l'union aux mêmes conditions que celles qui étaient prévues pour les États d’origine, une idée révolutionnaire dans les années 1780. La plupart des États ultérieurs furent formés à partir du territoire administré par les États-Unis, le Congrès (selon l’art. IV, section 3, de la Constitution) devant contrôler leur admission et le tracé de leurs frontières. Le Texas était une république indépendante avant son admission en 1845, et cinq États (le Vermont, le Kentucky, le Tennessee, le Maine, et la Virginie-Occidentale) furent formés à partir du territoire dÉtats plus anciens. Dans les quatre premiers cas, le législatif de l'État plus ancien donna son consentement. La Virginie-Occidentale faisait partie de la Virginie, mais elle resta fidèle à l'Union fédérale lorsque la Virginie fit sécession en 1861 pendant la Guerre civile, et elle fut admise au moyen de procédures constitutionnelles contestées dans le courant de cette guerre.

La ratification vigoureusement combattue de la Constitution en 1788, l'inauguration du nouveau gouvernement en 1789 et l'adoption de la Déclaration des droits en 1791 (exigée par les adversaires antifédéralistes de la Constitution), achevèrent la fondation de la nation. La Constitution fut une belle réussite, mais elle laissa de côté la question de l'esclavage. Beaucoup de fondateurs étaient opposés à l'esclavage, mais considéraient qu'il n'était pas viable économiquement et qu’il disparaîtrait bientôt. Cependant, l'économie esclavagiste du sud était florissante, particulièrement après l'invention de l’égreneuse à coton en 1793, et le conflit régional alimenté en partie par les inquiétudes des sudistes à l'égard des prises de position anti-esclavagiste du nord déboucha finalement sur une guerre civile.

La fin de la Guerre civile suscita l'adoption de trois modifications constitutionnelles : le Treizième amendement (1865) proscrivit l’esclavage; le Quatorzième (1868) accorda aux citoyens la protection du fédéral contre les violations des droits par les États; et le Quinzième (1870) défendit aux États d'empêcher les hommes de voter pour des raisons « de race, de couleur ou de condition antérieure d’esclavage. » Les trois modifications confièrent au Congrès la compétence de faire exécuter leurs mandats par des « lois appropriées » et ils établirent des normes juridiques permettant de contester devant les cours fédérales des lois ou des mesures mises en place par des fonctionnaires d’État. Quelques commentateurs considèrent que ces modifications complétaient les travaux de la création de la nation, en éliminant le compromis de la Constitution sur l'esclavage et en exécutant l'engagement pris dans la Déclaration d’indépendance (1776) selon lequel « tous les hommes sont égaux à

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la naissance. » D'autres critiques estiment que les modifications ont sensiblement changé l'équilibre des pouvoirs en faisant passer ceux-ci des États au gouvernement fédéral, initiant ainsi un changement fondamental dans le concept de la

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Constitution.

D’une manière ou d’une autre, une des façons de comprendre le développement constitutionnel fédéral depuis la Guerre civile est de reconnaître que le Président Abraham Lincoln et les autres opposants à l’esclavage ont élevé la Déclaration au statut de référence morale et non légale — pour l’interprétation de la Constitution fédérale, particulièrement en ce qui concerne les droits individuels. Tous les mouvements de droits civils concernant entre autres les femmes, les Afro-américains, les Hispano-américains, les autochtones, les personnes handicapées, les gais et lesbiennes ont fait appel à la Déclaration comme base morale pour la revendication de droits constitutionnels. Ceci, en échange, a servi à augmenter le pouvoir fédéral. Puisque la Déclaration affirme que les Américains forment un seul peuple, les groupes qui font face à la discrimination et à l'exclusion réclamèrent le droit à l’intégration et, ainsi, la pleine et égale protection de tous les droits et de tous les privilèges accordés aux Américains par la Constitution fédérale.

LES ETATS DANS LUNION FEDERALE

La Constitution américaine confirme le rôle-clé des États dans le système constitutionnel. Ceux-ci y sont mentionnés plus de 50 fois, et certaines questions cruciales relatives au gouvernement fédéral (par exemple, le choix des Grands électeurs et la tenue des élections pour le Congrès) dépendent de l'exercice de la compétence des États. Ainsi, on peut affirmer qu’il s’agit d’une « constitution incomplète », dans la mesure où son application dépend des constitutions d'État, qui la « complètent » et constituent une partie de l’ensemble du système

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constitutionnel.

Le système fédéral américain est symétrique. Tous les États jouissent du même statut constitutionnel. Leur existence et leurs compétences sont garanties constitutionnellement plutôt que d’être soumis au contrôle du gouvernement américain. La Constitution garantit la position des États de plusieurs manières. D'abord, elle n’accorde que des compétences limitées au gouvernement fédéral et réserve les compétences résiduelles aux États ou au peuple. Le Dixième Amendement (1791) déclare que « les pouvoirs qui ne sont pas délégués aux États-Unis par la Constitution, ni refusés par elle aux États, sont conservés par ces derniers ou par le peuple ». Bien que cette déclaration ait pu, à l’origine, avoir été la plus importante protection des États, l'expansion de la compétence nationale à partir des années 30, ainsi que le fait que la Cour suprême ne se soit pas opposée à cette expansion, ont soulevé la question de savoir si cette modification demeure une protection efficace de l'autonomie des États. Depuis le début des années 90, la Cour suprême s'est montré plus disposée à préserver la compétence des États et à réduire le pouvoir fédéral. Toutefois, ses jugements n'ont réussi qu'à freiner l'expansion du pouvoir fédéral sans annuler les effets de jugements antérieurs

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encourageant cette expansion.

De plus, la Constitution accorde une protection substantielle de l'intégrité territoriale des États, en interdisant que leurs frontières soient modifiées non seulement par l’entremise de lois du Congrès, mais également par des procédures

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ordinaires de modifications constitutionnelles.La Constitution assure également aux États un rôle dans la sélection des fonctionnaires fédéraux et dans les procédures du gouvernement fédéral. À l’origine, les sénateurs américains, lesquels représentaient directement les intérêts de leur État respectif, étaient choisis par les législatifs des États. Le Dix-septième amendement (1913) institua l'élection des sénateurs par le peuple; toutefois, les États jouissent encore d’une représentation égale au Sénat (deux sénateurs chacun), et c'est une disposition constitutionnelle qui ne peut être modifiée par les générations futures. En outre, dans la mesure où les États ne font pas de discrimination en raison de la race, du genre, ou d'autres facteurs, ce sont eux qui fixent également les conditions d’éligibilité lors des élections fédérales et étatiques. Enfin, en vertu de l'article V, les modifications constitutionnelles doivent être ratifiées par les trois quarts des États. En résumé, les protections prévues afin de garantir l'autonomie et les intérêts des États confirment l’affirmation de Madison selon laquelle le système créé par la Constitution était partiellement national et en partie (con)fédéral.

Les États ont la compétence de créer leurs propres institutions gouvernementales. La Constitution fédérale leur impose peu de restrictions dans ce domaine. Elle enjoint le gouvernement fédéral à « garantir à chaque État de cette Union un type de gouvernement républicain [c.-à-d., une démocratie représentative] » et elle confirme la suprématie du droit fédéral dans ses champs de compétence constitutionnels sur

« n'importe quel objet issu de la constitution ou des lois d’un État. » 15 Les XVe, XIXe, XXIVe et XXVIe amendements limitent la compétence des États quant à la restriction du droit de vote. Néanmoins, les États conservent un large pouvoir dans la création de leurs propres institutions et de leurs procédures gouvernementales. Chaque État adopte sa propre constitution, et la Cour suprême de chaque État est l'interprète final de cette constitution et du droit de l'État en général. Chaque État élit ou nomme ses propres fonctionnaires sans l’intervention ou l’approbation du gouvernement fédéral. Enfin, chaque État adopte ses propres lois, et celles-ci sont applicables, à moins qu'elles entrent en conflit avec le droit fédéral.

En revanche, les 87 900 collectivités locales du pays ne sont pas reconnues par la Constitution fédérale. Pour les besoins de la majeure partie du droit constitutionnel fédéral, les collectivités locales relèvent entièrement des gouvernements d'État. Dans la plupart des États, le législatif peut créer, supprimer, et changer les frontières des collectivités locales. Dans les quelques États qui abritent de grandes villes, telles que New York, la constitution d’État accorde à la ville un certain statut constitutionnel ou une certaine reconnaissance constitutionnelle. La situation s'est récemment améliorée dans ce domaine en raison de l'insertion dans les constitutions d'État de dispositions interdisant aux législatifs d'État d’imposer des « mandats » aux collectivités locales sans leur fournir le financement adéquat pour mener à bien les fonctions, devoirs et responsabilités qui leur sont confiés. Environ la moitié des États imposent des restrictions concernant les « mandats non financés ». Certaines de ces restrictions sont cependant législatives plutôt qu'incluses dans les constitutions étatiques.

Les tribus autochtones reconnues par la fédération ont un statut distinct. Elles élaborent leurs propres constitutions, élisent leurs propres dirigeants et leur pouvoir de gouvernance est considérable. Néanmoins, la jurisprudence de la Cour suprême américaine ne prévoit aucune limite constitutionnelle au pouvoir du Congrès de soumettre le peuple autochtone à sa tutelle; ainsi, le droit à l'autodétermination des tribus est en fin de compte plutôt une question de grâce du

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Congrès qu'une question de droit.

LA RÉPARTITION DES COMPÉTENCES

Les principes constitutionnels

L'article I, section 8, de la Constitution énumère les compétences législatives du Congrès, et le Dixième amendement confirme que les compétences qui ne sont pas déléguées au gouvernement fédéral sont réservées aux États ou à la population des États. Toutefois, des complications surgissent lorsqu’il s’agit de déterminer comment l’énumération des compétences dans la Constitution affecte les compétences des États. Hamilton constate que « les gouvernements des État conserveront manifestement les droits inhérents à la souveraineté qu’ils avaient précédemment et qui ne sont pas, lors de la ratification de la Constitution,

exclusivement délégués aux États-Unis. » 17 Cette affirmation laisse supposer que les pouvoirs délégués au gouvernement fédéral peuvent être divisés en (1) compétences exclusives, lesquelles ne peuvent pas être exercées par les États; (2) compétences concurrentes, dont la délégation au gouvernement fédéral ne restreint pas le pouvoir des États; et (3) compétences ni totalement exclusives ni entièrement concurrentes, dont la délégation au gouvernement fédéral limite sans complètement exclure lexercice des compétences des États.

La Constitution accorde des compétences exclusives au gouvernement fédéral de diverses manières. Quelques compétences exclusives, comme les compétences liés à la capitale (art. I, section 8), sont expressément déléguées. D'autres compétences sont d’un côté accordées au gouvernement fédéral et de l’autre refusées aux États. Par exemple, la Constitution autorise d’une part le président à conclure des traités, sur l’avis et avec le consentement du Sénat (art. II, section 2), et elle interdit d’autre part aux États de le faire (art. I, section 10). Enfin, quelques compétences attribuées au gouvernement fédéral, telles que le pouvoir de déclarer la guerre (art. I, section 8), sont, de par leur nature, exclusives et ne peuvent ainsi pas être exercées par les États.

En accordant d’autres compétences au gouvernement fédéral, la Constitution n’exclut ni expressément ni implicitement les lois des États. La compétence concurrente d’imposition est un exemple type. Selon l'article sur la suprématie (art.

VI), les dispositions d'État sont déclarées inconstitutionnelles si elles entrent en conflit avec une loi fédérale. De cette façon, l'exercice du pouvoir fédéral peut diminuer la compétence des États, mais en l'absence d'une loi fédérale contradictoire, ceux-ci sont libres d’exercer leurs compétences concurrentes.

D'un autre côté, certaines délégations constitutionnelles de compétences ne sont ni complètement exclusives ni totalement concurrentes. Si les États exerçaient au maximum ces compétences, le gouvernement fédéral ne pourrait pas s'assurer que l'objectif de chaque compétence soit atteint. Cependant, l'élimination complète de l’autorité des États mettrait en péril la légimitme autonomie de ces derniers. La compétence la plus importante de cette catégorie est celle du commerce. Une réglementation excessive du commerce interétatique par les États pourrait menacer le marché commun national que la Constitution a tenté de créer. En même temps, ces derniers ont un intérêt certain à protéger la santé, la sécurité, le bien-être et la moralité de leurs citoyens et ils ne devraient ainsi pas être empêchés de légiférer dans ces domaines. La Cour suprême joue un rôle central dans l’équilibre des intérêts concurrents de la nation et des États, en s'assurant que les États peuvent protéger leurs citoyens tout en ne limitant pas outre mesure la liberté de commerce.

L’évolution constitutionnelle

La particularité fondamentale de l'histoire constitutionnelle américaine fut l'expansion du pouvoir du gouvernement fédéral. Ce processus fut facilité par le fait que la Cour suprême a interprété les compétences attribuées au Congrès de façon large, ainsi que par les modifications constitutionnelles notamment, les Quatorzième et Seizième lesquelles ont conféré d’importantes compétences additionnelles au Congrès. Les États eux-mêmes ont souvent réclamé que le fédéral ait davantage de pouvoir afin de satisfaire leurs propres besoins et intérêts, et leur appétit pour les subventions n'a rien fait pour décourager l'expansion du centre. Les groupes d'intérêt ont également joué un rôle important dans l’accroissement du pouvoir fédéral, en partie parce que, comme les grands hommes d’affaires le disent souvent, ils préfèrent devoir se plier aux règlements d'un gorille de 500 livres qu'à ceux de 50 singes.

En conséquence, bien que le Dixième amendement prévoie que les États conservent les compétences qui ne sont pas déléguées au gouvernement fédéral, les domaines de contrôle exclusif des États se sont progressivement érodés. Depuis le début des années 30, le gouvernement fédéral couvre une grande variété de domaines politiques par exemple, la lutte antipollution, les relations interraciales, et la protection des consommateurs qui étaient, à l’origine, de compétences principalement étatiques. La croissance du pouvoir fédéral n'a suscité presque aucun conflit parce que les politiques fédérales et étatiques ont souvent été complémentaires. Néanmoins, lorsque le gouvernement fédéral a commencé à réglementer des secteurs traditionnellement dominés par les États, les champs de compétences dans lesquels les deux instances cherchent à faire prévaloir leur autorité se sont multipliés. Lorsque la politique fédérale et celle des États s’entrechoquent, la disposition sur la suprématie (art. VI) exige que la politique fédérale l'emporte sur les politiques d’État contradictoires.

Durant les premières années, la Cour suprême, en particulier au cours de la présidence de John Marshall (1801-35), défendit la suprématie du gouvernement fédéral. Cependant, à partir de 1840 jusqu'à la Nouvelle donne des années 30, la Cour chercha davantage à retrouver un certain équilibre en limitant la capacité du Congrès d’étendre son pouvoir aux dépens des États. Au début, la Cour combattit les principales lois de la Nouvelle donne du milieu des années 30 sous prétexte qu'elles violaient les principes du fédéralisme, mais sous la pression politique intensive du président Franklin D. Roosevelt, une nouvelle majorité émergea au sein de la Cour, laquelle commença à soutenir l’expansion du pouvoir fédéral. Par la suite, la Cour adhéra fortement à l’extension des compétences fédérales, particulièrement dans les secteurs du commerce, de la politique sociale, et des droits civils. Toutefois, ces dernières années, la Cour a changé de direction. Une faible majorité de 5 contre 4 en faveur des droits des États au sein de la Cour, présidée par William Rehnquist, s’efforça d'invalider certaines lois fédérales sous prétexte qu'elles réduisaient l'autonomie constitutionnelle des États. La Cour ressuscita l'idée que le gouvernement fédéral ne peut pas « balayer » législativement « l'immunité souveraine » des États, en réduisant de ce fait les possibilités des citoyens de

poursuivre les États en justice pour violation de lois fédérales.18 Elle a également jugé que le gouvernement fédéral ne peut pas « réquisitionner » les législatifs d'État ou les fonctionnaires des exécutifs, en exigeant d'eux qu’ils exécutent des

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programmes fédéraux.

La conception des relations entre le gouvernement fédéral et les États changea également avec le temps. Un contraste s’est historiquement dessiné entre le fédéralisme bipolaire et le fédéralisme coopératif. Le fédéralisme bipolaire soulignait la séparation des deux ordres de gouvernement ainsi que les besoins de confiner chacun dans sa propre sphère de responsabilité et d'empêcher l'un d’empiéter sur la souveraineté de l'autre. Certains firent remarquer que les termes vagues utilisés par les rédacteurs de la Constitution favorisaient un système de compétences concurrentes nuancées qui demandaient un fédéralisme coopératif fondé sur des pouvoirs partagés et un soutien mutuel : le gouvernement fédéral aide les États à assumer leurs fonctions de base et les États secondent le gouvernement fédéral dans la réalisation de ses objectifs nationaux. Le fédéralisme coopératif caractérisa les relations entre le fédéral, les États et les collectivités locales à partir de 1932 jusqu’à la fin des années 60, période où le gouvernement fédéral versa toujours plus d'argent aux gouvernements d’État et aux collectivités locales et où toute la politique publique devint intergouvernementale. Depuis la fin des années 60, cependant, beaucoup d’analystes qualifient le fédéralisme de réglementaire ou coercitif, un système dans lequel le gouvernement fédéral est prédominant et les États coopérent en ce sens qu'ils consentent à collaborer. Cette période fut marquée par une augmentation sans précédent des conditions attachées aux subventions, des mandats confiés aux États, de l'exercice de la primauté fédérale sur des lois d'État, d'intrusions fédérales dans les assiettes fiscales des États, d'ordonnances de la cour

fédérale, et par la fédéralisation du droit pénal des États.20

En réaction à cette centralisation, plusieurs présidents en particulier les républicains Richard M. Nixon (1969-74) et Ronald Reagan (1981-89) proposèrent un « nouveau fédéralisme » afin de redonner des compétences aux États. Il y eut cependant peu de changement dans cette direction, à part une plus grande flexibilité administrative pour les États pour ce qui concerne l'exécution de politiques fédérales. Le président Reagan, par exemple, qui défendait dans ses discours les droits des États, ratifia plus de lois fédérales exerçant la primauté des compétences fédérales sur celles des États que n'importe quel autre président avant lui.

LA STRUCTURE ET LE FONCTIONNEMENT DU GOUVERNEMENT

Le gouvernement fédéral

En rédigeant la Constitution, les délégués à l'Assemblée constitutionnelle cherchèrent à créer un gouvernement auquel on pouvait confier sans risque des compétences aussi étendues que possible afin de réaliser les buts qui lui sont assignés. Rendre le gouvernement dépendant du peuple constituait une partie de la réponse, tout comme élargir la république commerciale. Deux autres moyens permettant de réaliser cet objectif furent d’instituer un système basé sur le principe des poids et contrepoids et sur la séparation des pouvoirs. Les délégués étaient conscients du fait que « la réunion des pouvoirs législatifs, exécutifs, et judiciaires sous une seule et même autorité, à savoir sous celle d'une personne, de quelquesunes, ou d’un grand nombre, et par un mode héréditaire, d'autonomination, ou d’élection, répondrait à la définition même de la tyrannie »; c’est pourquoi, « la garantie de la liberté exige que les trois grands organes du pouvoir soient séparées

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et distinctes. » Ainsi, les rédacteurs cherchèrent à créer un gouvernement composé de trois branches coordonnées et égales, chacune remplissant un ensemble de fonctions, qui permettraient un certain équilibre des compétences gouvernementales. Leur but était de structurer le gouvernement de telle sorte que les relations mutuelles entre les trois pouvoirs consolident le rôle respectif de chacun.

La Constitution institue un système présidentiel, selon lequel le président est élu et officie en tant que chef de l’exécutif et chef d'État; un Congrès bicaméral exerce le pouvoir législatif; et des cours fédérales indépendantes exercent le pouvoir judiciaire fédéral. La chambre « nationale » du Congrès, la Chambre des représentants, comprend 435 membres, élus dans les districtss de chaque État pour une période de deux ans. La représentation des 50 États est répartie en fonction de la population (bien que chaque État ait la garantie d’avoir au moins un représentant). Les districtss sont réajustés par les législatifs d'État tous les dix ans selon les données du recensement fédéral, et la Cour suprême jugea dans l’affaire Wesberry c. Sanders (1964) que les districtss d’un même État doivent avoir une

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population égale.La chambre « (con)fédérale », le Sénat, est composée de 100 membres, deux par État, élus dans tous les États pour une période de six ans échelonnés (tous les deux ans, des élections sont tenues pour un tiers des sièges sénatoriaux). En plus de ses compétences législatives, le Sénat a le pouvoir de faire des recommandations et de donner son consentement à la conclusion des traités (par une résolution adoptée par les deux tiers des voix) et aux nominations présidentielles dans les organes exécutifs ainsi qu’au sein du pouvoir judiciaire fédéral (par un vote majoritaire).

Les fondateurs comptèrent sur le fait que la division du Congrès en deux chambres de taille différente et dotées de différents systèmes de répartition des sièges, modes de sélection et durées des mandats, générerait des prises de position distinctes au sein des chambres, ce qui favoriserait un examen plus approfondi des projets de loi. Ils s’attendirent également à ce que la représentation des États au Sénat garantisse la prise en considération de leurs intérêts et préoccupations par le gouvernement fédéral lors de l'élaboration de politiques. Il est difficile de déterminer si cela s'est concrétisé ou non. La ratification du Dix-septième amendement modifia le système de sélection des sénateurs et abrogea l’un des principaux dispositifs structurels que les fondateurs avaient imaginés pour protéger les intérêts des États. En vertu de cette modification, les sénateurs sont maintenant élus directement par le peuple, alors qu'ils étaient jusque-là nommés par les législatifs d'État. Dans l’affaire Garcia c. San Antonio Metropolitan Transit Authority (1985), une majorité de 5 membres au sein de la Cour suprême jugea néanmoins que « les rédacteurs avaient choisi de se reposer sur un système fédéral dans lequel les restrictions particulières imposées par les États au pouvoir fédéral étaient principalement inhérentes au fonctionnement du gouvernement national lui-même » et que les intérêts des États étaient principalement « protégés par des procédures inhérentes à la structure du système fédéral. » Quatre juges ne furent pas du même avis, en affirmant que « le rôle des États... est une question de droit constitutionnel, et non de grâce

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législative ».

L'article II de la Constitution attribue au président le pouvoir exécutif ainsi que diverses compétences et responsabilités, telles que celles d’opposer son veto à des lois, de nommer les fonctionnaires de l’exécutif et les juges fédéraux, d’officier en tant que commandant en chef des forces armées de la nation, et de s'assurer que les lois fédérales soient fidèlement exécutées. Ces compétences font du président un participant de grande importance au sein du système de poids et contrepoids. L’évolution historique a également contribué au développement de la puissance présidentielle, notamment en raison de la place grandissante de la nation sur la scène internationale, étant donné que la Constitution attribue au président un rôle majeur dans la conduite de la politique étrangère. Dans la sphère nationale, la croissance de la taille du gouvernement fédéral a également donné plus de portée aux compétences du président quant aux nominations, à la supervision de l'administration, et à la mise en œuvre de politiques publiques.

Le président est élu par un « collège électoral ». Il s'agit d'un système conçu afin de s'assurer que le chef de l’exécutif ne dépende pas du législatif et soit par conséquent à même de lui faire contrepoids. Ce procédé renforce également le poids électoral des petits États et des minorités en exigeant des candidats qu’ils trouvent de l'appui dans diverses régions. Chaque État dispose de votes au collège électoral en fonction de sa représentation au Congrès : deux sénateurs, plus le nombre de représentants qu'il a au sein de la Chambre des représentants. Quarante-huit États attribuent toutes les voix du collège électoral au candidat présidentiel qui reçoit le plus de voix populaires dans l'État. En principe, le candidat qui reçoit le plus de votes populaires dans tout le pays reçoit également le plus grand nombre de voix électorales. Cependant, dans des élections serrées, ce n’est pas toujours le cas. En 2000, le candidat démocrate, Albert Gore, gagna le vote populaire sur le plan national par 500 000 voix (0,5 pour cent de toutes les voix), mais il perdit au collège électoral contre le candidat républicain, George W. Bush, avec 266 voix contre 271.

L'article III de la Constitution institue la Cour suprême et les « cours inférieures que le Congrès pourra petit à petit nommer et instaurer. » Le Congrès répondit à cette invitation en créant un système de cours fédérales à trois niveaux. Les juges fédéraux sont nommés par le président, confirmés par le Sénat, et occupent leur poste « à titre amovible ». Les cours de district servent de cours fédérales de première instance, avec au moins une cour de district dans chaque État. Les treize cours d’appel traitent des appels issus des cours de districts. Onze de ces cours sont organisées de façon régionale, le « circuit » de chaque cour étant composé d'au moins trois États. La Cour d’appel du district de Columbia sert de cour suprême d'État pour le District de Columbia, et un grand nombre d'appels issus des services administratifs fédéraux (circuit fédéral) se retrouvent devant la Cour d’appel des États-Unis.

Au sommet du système des cours fédérales se trouve la Cour suprême. Cette entité, composée de neuf membres, réexamine les affaires jugées par les cours d’appel fédérales et les cours suprêmes d'État. Sur les plus de 7 000 cas pour lesquels il est interjeté appel auprès d’elle chaque année, seules 100 affaires sont acceptées et aboutissent à une décision. La Constitution lui a également conféré une juridiction de première instance très limitée sur les litiges concernant le personnel diplomatique étranger et ceux où un État est une partie. Enfin, en tant que président de la Cour, John Jay affirma en 1793, en réponse à une requête du président Washington, que la Cour n’émet pas d’avis consultatifs (bien que plusieurs cours suprêmes d’État soient autorisées à le faire).

L'article III assigne quatre buts principaux aux cours fédérales. Premièrement, afin de faire valoir l'autorité du gouvernement fédéral, les cours fédérales sont autorisées à traiter des cas tombant sous le coup de la Constitution américaine, du droit américain et des affaires où le gouvernement fédéral est une partie. Bien que la compétence liée au contrôle judiciaire ne soit pas mentionnée dans la Constitution, la Cour suprême jugea dans l’affaire Marbury c. Madison (1803) que la compétence de « déclarer ce qu'est le droit [fédéral] » comprend la compétence de juger de la constitutionnalité des lois fédérales et d’État, et toutes les cours fédérales

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exercent la compétence liée au contrôle judiciaire.Deuxièmement, afin de conserver le contrôle fédéral exclusif sur les affaires étrangères, les cours fédérales sont habilitées à traiter des cas d'amirauté, des affaires relatives aux traités, de celles impliquant les ambassadeurs ou tout autre personnel diplomatique des pays étrangers, ainsi que de cas opposant les États ou leurs citoyens à des États étrangers ou leurs citoyens. Troisièmement, afin de maintenir la courtoisie interétatique, les cours fédérales sont compétentes pour juger des conflits entre deux ou plusieurs États et entre un État et un citoyen d'un autre État. Enfin, afin de protéger les parties d'un État contre d’éventuels préjugés des tribunaux d'un autre État que le leur, les cours fédérales sont habilitées à se saisir des affaires civiles entre des citoyens d’États différents.

Les gouvernements des États

Les gouvernements étatiques américains ont tous des structures politiques similaires. Les 50 constitutions d'État ont institué un système présidentiel où le chef de l’exécutif, le gouverneur, est élu par le peuple plutôt que par le législatif. Elles ont toutes instauré une division tripartite du pouvoir gouvernemental (législatif, exécutif, et judiciaire), prévu des élections périodiques, et garantissent un ensemble de droits fondamentaux. Tous les États, sauf le Nebraska, ont créé un législatif bicaméral et élisent leurs législateurs au cours d'élections opposant des partis politiques. Les gouvernements d'État se distinguent par la taille de leur législatif, le nombre et les compétences de leurs organes administratifs élus séparément, le nombre de ministères administratifs, et la structure du système judiciaire d'État. La différence la plus importante concerne le nombre d'organes administratifs élus. L'élection de fonctionnaires administratifs fut introduite au cours du dix-neuvième siècle afin d’assurer un plus grand contrôle démocratique du gouvernement, et cette pratique a survécu jusqu’à aujourd'hui en dépit des revendications de réformateurs du vingtième siècle qui avançaient que ces postes nuisaient à l'efficacité du gouvernement et à l'autorité exécutoire du gouverneur. Les fonctionnaires administratifs (par exemple, le procureur général, le secrétaire d'État et le trésorier) sont élus par le peuple et non par le gouverneur, et jouissent d’une indépendance politique considérable, et, dans bon nombre d'États, peuvent être des rivaux politiques du gouverneur.

Les relations entre États et entre le fédéral et les États

Les dispositions constitutionnelles relatives aux relations entre États et entre le gouvernement fédéral et les États abordent différents thèmes. Premièrement, elles stipulent l'autonomie des États. Par exemple, le gouvernement fédéral ne peut pas intervenir pour protéger un État contre des violences internes sans qu’il y ait eu une demande expresse du législatif d'État ou du gouverneur. Bien que le gouvernement fédéral doive « garantir à chaque État de l'Union un type de gouvernement républicain, » cette disposition ambiguë eut peu d'effet sur la façon dont les États structurèrent leurs institutions politiques. Deuxièmement, elles traitent des conflits d’autorité pouvant surgir entre le gouvernement fédéral et les États, ces litiges étant aggravés, comme l’a fait remarquer Madison, par la difficulté de « départager clairement les compétences générales et les compétences des gouvernements

d’États. » 25 La disposition relative à la suprématie de la Constitution confirme que le gouvernement fédéral est suprême dans sa sphère, « même s'il va à l'encontre de la Constitution ou des lois d’un État ». De plus, les fonctionnaires étatiques doivent faire le serment de respecter la Constitution nationale. L'énumération des compétences dans l’article I et la ratification subséquente du Dixième amendement indiquent que la sphère d'autorité fédérale est limitée. Troisièmement, il est question de « l’esprit de clocher » des États. On contourne ce problème grâce au transfert de certaines compétences au gouvernement fédéral (par exemple, la compétence de régler le commerce entre les États), en permettant à des litiges civils entre citoyens de différents États d'être jugés par les cours fédérales (qui sont présumées plus impartiales que celles des États), et en protégeant les citoyens d'un État se trouvant dans un autre État contre la discrimination en vertu de la disposition portant sur les privilèges et immunités de l'article IV. Le quatrième thème reflète le souhait que l'adhésion courtoise des tribunaux d'un État aux décisions rendues dans un autre État soit la norme. La Constitution encourage cette pratique en spécifiant les obligations des États entre eux. Les États sont obligés d’accorder leur bonne foi et leur pleine confiance aux lois d'intérêt public et aux jugements des autres États (par exemple, en reconnaissant les permis de conduire et les licences de mariage des autres États). Ils sont également contraints d’extrader les fugitifs recherchés par la justice d'autres États et, avant la Guerre civile, ils devaient renvoyer les esclaves qui s’étaient enfuis. Le cinquième thème abordé traduit la volonté d’améliorer la coopération entre les États en ce qui concerne la résolution de problèmes communs tout en sauvegardant les intérêts fédéraux. Ainsi, la Constitution reconnaît aux États la compétence de conclure des accords

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entre eux, mais uniquement avec le consentement du Congrès.

LES COMPETENCES FISCALES

Les rédacteurs constitutionnels attribuèrent au Congrès un pouvoir d’imposition limité de sorte que le gouvernement fédéral puisse réunir les fonds nécessaires au financement de ses opérations sans devoir dépendre des États. La Constitution fixe trois limites claires à cette compétence : le Congrès ne peut pas imposer les exportations; il doit répartir les impôts directs entre les États en fonction de leur population; et il doit fixer des impôts uniformes dans tout le pays. Seule la restriction, peu précise, concernant les impôts directs suscita la polémique. Dans l’affaire Pollock c. Farmer’s Loan & Trust Company (1895), la Cour suprême soutint que parce que les impôts sur les biens immobiliers sont des impôts directs, il en va

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de même des impôts sur les revenus provenant des biens immobiliers.Cette décision, qui dans les faits empêcha l'imposition de tout type d'impôt fédéral sur les revenus, fut renversée par la ratification du Seizième amendement en 1913.

L'octroi de la compétence d'imposition au gouvernement fédéral n’exclut pas l’imposition par les États. Il s’agit d’une compétence concurrente parce que les États conservent le droit d’imposer tout ce qu’ils souhaitent pour autant que l’impôt ne discrimine pas les personnes ou les entreprises des autres États; qu’il ne viole pas les droits civils de quiconque ou l’interdiction constitutionnelle concernant les impôts des États sur les importations et exportations. La Constitution ne contient aucune disposition sur le partage des recettes ou la péréquation fiscale; elle n'exige pas que le gouvernement fédéral ou les États coopèrent ou coordonnent leurs efforts sur les questions fiscales, ni que les États harmonisent leurs systèmes fiscaux. L’affaire McCulloch c. Maryland (1819) institua la doctrine des immunités fiscales intergouvernementales, selon laquelle les États et les localités ne peuvent pas imposer les « intermédiaires » du gouvernement fédéral (par exemple, un tribunal fédéral) et, inversement, celui-ci ne peut pas non plus le faire avec les

« intermédiaires » des gouvernements d'État ou locaux.28

La Constitution fédérale n'exige pas que le gouvernement fédéral ou les gouvernements d’État équilibrent leurs budgets, et elle ne règle pas les emprunts fédéraux, d’État et locaux. Cependant, les constitutions d'État fixent des contraintes fiscales pour les gouvernements d’État et les collectivités locales; elles contiennent souvent des dispositions détaillées concernant leurs compétences liées au prélèvement des impôts, à loctroi d'exonérations fiscales, à l'emprunt d’argent au moyen d'émission d'obligations, et à l'utilisation des fonds ainsi perçus. De nombreuses constitutions d'État ont les mêmes exigences d'uniformité fiscale que celles prévues dans la Constitution fédérale par exemple, la Constitution de la Pennsylvanie exige que « tous les impôts soient uniformes, pour tout objet de même

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catégorie, dans les limites territoriales du pouvoir d’imposition. » En outre, de nombreux États ont adopté des modifications par des initiatives constitutionnelles qui limitent le droit d'imposition des gouvernements d’État et locaux. Par exemple, en 1978, la Californie adopta la « Proposition 13 », laquelle permit de réduire les impôts fonciers locaux ainsi que d'établir un plafond pour les augmentations futures, et en 1992, le Colorado adopta la « Déclaration des droits du contribuable »

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qui exige l'approbation populaire par référendum de tous les nouveaux impôts.La plupart des constitutions d'État exigent également que les gouvernements d'État aient des budgets de fonctionnement équilibrés. Nombreuses sont celles qui limitent en outre les emprunts d’État et locaux, en exigeant que les projets relatifs à l’endettement soient soumis à un référendum populaire. Ainsi, alors que la Constitution fédérale inflige peu de contraintes aux compétences fiscales des gouvernements fédéral et étatiques, les constitutions d'État imposent quant à elle une grande variété de limitations.

Les arrangements fiscaux du système fédéral ont changé radicalement depuis le début des années 30. L’article I, section 8(1), confère au Congrès le droit de prélever certains impôts et de percevoir des droits. Le gouvernement fédéral préleva un impôt sur le revenu durant la Guerre civile, mais il n’introduisit pas d’impôt permanent et progressif sur le revenu avant l’adoption du Seizième amendement (1913), lequel ôta tout doute sur la constitutionnalité de cet impôt. Grâce à cette compétence, le gouvernement fédéral devint, dès la Deuxième Guerre mondiale, l’autorité fiscale prédominante. Il se fonda de plus en plus sur cette compétence, aussi bien que sur le déficit actif, pour faire pression sur les États, en les amenant à participer aux programmes fédéraux par des offres d’aides financières conditionnelles. Par son pouvoir de dépenser, le Congrès peut étendre son influence dans de nombreux domaines normalement réservés aux États. Il peut atteindre indirectement ses objectifs en assortissant des conditions aux programmes fédéraux de dépenses ou d’aides financières. Dans l’affaire South Dakota c. Dole (1987), la Cour suprême a confirmé cette utilisation de la compétence fédérale, en affirmant que les « objectifs non inclus dans les domaines législatifs énumérés à l'article I... peuvent néanmoins être atteints par l'utilisation du pouvoir de dépenser et l’octroi

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conditionnel de fonds fédéraux. »Dans cette affaire, la Cour confirma une condition relative à une aide fédérale pour la construction d’autoroutes, laquelle exigeait que tous les États relèvent à 21 ans l’âge minimal pour acheter des boissons alcoolisées. Les États qui ne l’auraient pas fait auraient perdu une partie de cette aide financière.

LES AFFAIRES ETRANGERES ET LA DEFENSE

La conduite des affaires étrangères est une compétence avant tout fédérale, plutôt qu'étatique. Pour reprendre les propos de Madison : « Si nous nous définissons comme une nation de quelque façon que ce soit, cela doit manifestement être par

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rapport aux autres nations. »La Constitution reconnaît ce principe non seulement en accordant des compétences importantes au président et au Congrès, mais également en les refusant expressément aux États ou en s'assurant que leur exercice par les États n’entre pas en conflit avec la politique fédérale. Ainsi, l'article I, section 10, de la Constitution interdit aux États de conclure des traités et des alliances avec des nations étrangères, ou de former une confédération avec celles-ci, mais il leur permet de signer des accords et des conventions avec des États étrangers sous réserve de l'approbation du Congrès, ce que beaucoup d'États ont fait. La Constitution interdit aux États de s'engager dans une guerre à moins que leur territoire soit occupé ou en danger imminent de l'être, mais elle leur accorde la capacité de se défendre par des milices d'état. Dans l’affaire Crosby c. National

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Foreign Trade Council (2000),la Cour annula une loi du Massachusetts interdisant à l'État d'acheter des marchandises ou des services de compagnies faisant affaire avec le Myanmar parce que cette loi entrait en conflit avec un règlement fédéral régissant le commerce avec ce pays. Cependant, la Cour laissa ouverte une des questions les plus fondamentales, soit celle de savoir si la Constitution exclut toute action des États concernant les affaires étrangères ou même toute sanction

économique des États contre des pays étrangers.34 Enfin, dans l’affaire American Insurance Association c. Garamendi (2003), la Cour invalida un règlement de la Californie destiné à aider les survivants de l’Holocauste à récupérer les prestations liées aux polices d’assurance-vie achetées pendant la Deuxième Guerre mondiale, en soutenant que cette réglementation entravait la compétence du président de conduire et contrôler la politique étrangère et qu’elle empiétait sur un domaine réservé à lui seul.

Chaque État a ses propres forces armées, appelées milices, et la Constitution leur garantit la compétence d'en nommer les officiers et d'en former les membres « selon les normes de discipline prescrites par le Congrès » (article I, section 8, paragraphe 16). À l’origine, la milice servait deux causes. Premièrement, les fondateurs craignaient qu’une vaste armée permanente soit dangereuse pour la liberté républicaine, et la milice était une alternative intéressante puisqu’il s’agissait de forces armées composées d’hommes libres et physiquement aptes pouvant aider à repousser les envahisseurs ou à apaiser les tensions intérieures. Ainsi, la Constitution autorise le Congrès à engager les milices d'État au service des États-Unis « pour exécuter les lois de l'Union, pour réprimer les insurrections, et pour repousser les invasions » (article I, section 8, paragraphe 15). Au moyen d'une loi, le Congrès a délégué cette compétence au président, qui officie en tant que commandant en chef de la milice quand elle est appelée à servir. Deuxièmement, la milice permettait aux États de résister à la tyrannie fédérale. Comme Madison le

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faisait remarquer, les usurpateurs fédéraux potentiels devaient faire face à « une milice s'élevant à près d’un demi-million de citoyens armés, commandés par des hommes choisis parmi les leurs, combattant pour leurs libertés communes, unis et

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conduits par un gouvernement bénéficiant de leur soutien et de leur confiance. »

Depuis la Deuxième Guerre mondiale, les États-Unis ont maintenu une armée puissante, ainsi la milice est moins importante. Avec le temps, le caractère de la milice a changé, en passant d'une force composée de tous les citoyens en une force élitiste et mieux entraînée, la Garde nationale. Dans l’affaire Perpich c. Department of Defense (1990), la Cour suprême confirma l’autorisation donnée par le Congrès d’entraîner la Garde nationale en dehors des États-Unis, contre les objections d'un gouverneur, en jugeant que l'exercice des compétences fédérales en matière

d’affaires étrangères supplantait les prérogatives des États.36

Le rôle des États en ce qui concerne la guerre et les affaires étrangères découle principalement de leur représentation au Sénat. Bien que la Constitution désigne le président « commandant en chef de l'armée et de la marine » (art. II, section 2, paragraphe 1), le Congrès a la compétence de réunir et soutenir les forces militaires, de déclarer la guerre, de régler le commerce avec les pays étrangers, et de suspendre l’ordonnance d’habeas corpus en temps de guerre. La Constitution accorde à la Chambre des représentants un rôle égal à celui du Sénat dans l’exercice des compétences militaires parce les individus pourraient être enrôlés pour la guerre et parce que ceux-ci doivent être taxés pour payer la guerre. La Constitution accorde au Sénat la compétence de confirmer les ambassadeurs et d'autres représentants, ainsi que de ratifier les traités au moyen d'une résolution adoptée par les deux tiers des voix, ce qui constitue une concession faite aux États du sud, lesquels craignaient que la règle de la simple majorité permette aux États du nord de ratifier des traités nuisibles à leurs intérêts. Elle accorde ainsi à la Chambre du Congrès, qui représente les intérêts des États, un pouvoir important dans des domaines de politique étrangère qui empiètent sur les compétences des États. Lorsque les États-Unis se transformèrent en puissance mondiale, le président devint un personnage incontournable dans la conduite de la politique étrangère et dans la mise en œuvre d’actions militaires. Néanmoins, le président a besoin de l'appui du Congrès pour présenter un front uni aux autres pays. Ainsi, le président George W. Bush demanda le concours du Congrès pour agir contre Al-Qaida à la suite des attaques sur le World Trade Center de la ville de New York en 2001 et pour entreprendre la guerre contre l'Irak en 2003.

LA CITOYENNETE

Le préambule de la Constitution indique que la Constitution émane de nuls autres que « Nous, peuple des États-Unis ». Ces termes révèlent une ambiguïté fondamentale au sujet du type de système qui a été créé. Les interprètes nationalistes ont compris que cela signifiait « Nous, peuple des États-Unis dans son ensemble », soulignant ainsi le désir des fondateurs d'accroître le pouvoir fédéral et de faire en sorte que les Américains soient reconnus comme un seul peuple dans la Déclaration d’indépendance. Les interprètes des droits des États ont considéré que l’expression voulait plutôt dire « Nous, peuples des différents États » qui s’unissent pour former une union plus parfaite, interprétant de ce fait la Constitution comme une union d’États plutôt qu’une union de personnes. Ils font remarquer que la Constitution a été ratifiée par des conventions dans les États plutôt que par un référendum populaire national et qu’elle ne permet pas au peuple d’agir directement dans aucun domaine. Ce débat a eu des conséquences importantes par exemple, les partisans sudistes de la sécession argumentèrent que si un État pouvait donner son consentement à une adhésion à l'union, il pouvait également retirer celui-ci. En outre, le conflit sur la nature de l'union fédérale se poursuit toujours.

Cette ambiguïté est accentuée par la question de la citoyenneté double fédérale et d’État prévue dans la Constitution. Celle-ci mentionne les citoyens d’État ainsi que les citoyens nationaux à différents endroits, mais elle ne les définit pas et n'indique pas leur corrélation. Dans l’affaire tristement célèbre de Dred Scott c. Sandford (1857), la Cour suprême admit la priorité de la citoyenneté d’État sur la nationale, jugeant que les personnes nées aux États-Unis héritaient leur citoyenneté de leur statut de descendants de ceux « qui étaient, à l’époque de l'adoption de la Constitution, reconnus comme des citoyens dans les États ». La Cour soutenait également que les Afro-américains ne pouvaient pas obtenir la citoyenneté des

États-Unis, ni par le biais d'un État ni par naissance dans tous les Etats-Unis.37 Le Quatorzième amendement (1868) renversa expressément la jurisprudence de l'affaire Dred Scott et confirma que « toutes les personnes nées ou naturalisées aux États-Unis et sujettes à son autorité, sont des citoyens des États-Unis et de l'État où elles résident » (section 1). La modification constitutionnelle reconnut ainsi la citoyenneté des Afro-américains, établit la priorité de la citoyenneté nationale sur celle d'État, et réduisit cette dernière à la simple résidence dans un État.

La Constitution accorde au Congrès la compétence « d'établir une règle uniforme de naturalisation » et dans l’affaire Chirac c. Chirac (1817), la Cour suprême confirma

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qu’il s’agit d’une compétence exclusive et non concurrente. Le Congrès a également la compétence d’exclure les étrangers des États-Unis l'admission étant un privilège accordé à certaines conditions que le Congrès peut prescrire et d'expulser ceux qui ont été admis. La Cour suprême a imposé quelques conditions procédurales aux audiences d'expulsion, mais elles sont considérablement moins

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nombreuses que celles qui concernent les accusés dans les procès pénaux.

VOTES, ELECTIONS ET PARTIS POLITIQUES

Les États ont la responsabilité principale d’organiser leurs propres procédures d'autogouvernance, lesquelles sont toutefois sujettes à quelques limites constitutionnelles fédérales. Ils ont également la lourde responsabilité de structurer les procédures politiques nationales, en exerçant en première instance la compétence de régler les élections du Congrès (la période, le lieu et la procédure), et de déterminer comment les Grands électeurs (c.-à-d., le collège électoral) sont choisis.

Entre la Déclaration d’indépendance et le projet de Constitution fédérale, chaque État instaura ses propres conditions d’éligibilité pour les élections d'État. Plutôt que d'imposer des normes uniformes pour les élections fédérales, qui seraient en désaccord avec les conditions d'électorat de certains États et créeraient ainsi des électorats d’État et fédéraux distincts, la Constitution s’appropria les diverses conditions d'électorat des États. Elle exigea que les conditions pour voter lors de l'élection de membres de la Chambre des représentants soient les mêmes que celles

requises pour les électeurs des législatifs d’État.40 Durant le dix-neuvième siècle, les États libéralisèrent les conditions de vote, en élargissant de ce fait sensiblement les électorats fédéraux et d’État. Aujourd'hui, les États continuent à déterminer l’admissibilité des électeurs (par exemple, en limitant le vote pour des raisons de résidence, d'incapacité mentale, et de condamnations pour infraction criminelle) et à détenir la responsabilité de l’inscription des électeurs. Cependant, des modifications constitutionnelles fédérales et des lois du Congrès limitent désormais la liberté des États en ce qui concerne l'établissement de conditions d’admissibilité. Le Quinzième amendement (1870) interdit aux États de refuser le droit de vote en raison de la race, de la couleur ou d’une condition antérieure d’esclave. Le Dixneuvième amendement (1920) garantit le droit de vote aux femmes. Le Vingtquatrième amendement (1964) prévoit que le droit de vote lors des élections fédérales ne soit pas refusé pour non-paiement de la taxe de vote ou de toute autre taxe. Le Vingt-sixième amendement (1971) a abaissé l'âge électoral à 18 ans à l'échelle nationale. Toutes ces modifications peuvent être mises en application par le Congrès au moyen d'une « loi appropriée ». En 1965, le Congrès promulgua la Loi sur le droit de vote, qui interdit la discrimination raciale lors de l’exercice et des procédures de votes. La loi exige également qu'avant l'entrée en vigueur de changements concernant l’exercice ou les procédures de vote, les fonctionnaires dans neuf États et dans certaines parties de sept autres États où la discrimination raciale était par le passé répandue, obtiennent l'approbation préalable du procureur général fédéral ou d'une cour fédérale. D'autres lois fédérales auxquelles les États doivent également se conformer proscrivent la violence et l'intimidation lors des élections, exigent des États qu’ils aient des procédures d'inscription des électeurs pratiques et faciles à suivre pour les élections fédérales (par exemple, la loi connue sous le nom de « motor voter »), et prévoient des règles sur le vote des

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absents pour les membres des forces armées.

Le droit de former un parti politique et tout autre groupement politique découle implicitement de la liberté d’expression, de réunion, et de demander au gouvernement la réparation de torts, tous prévus dans le Premier amendement (1791). En 1976, la Cour suprême considéra que le droit des individus et des groupes de financer des candidats et des partis politiques est garanti par le Premier

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amendement.Cependant, la Constitution fédérale ne traite pas expressément des partis politiques, et la plupart des constitutions d'État non plus.

PROTECTION DES DROITS

La Constitution d’origine comprenait plusieurs protections importantes des droits. Elle interdisait les décrets de confiscation de biens et de mort civile (actes législatifs déclarant des personnes coupables de crimes et les condamnant sans passer devant un tribunal) et les lois ex post facto. Elle définissait expressément et limitait la trahison de sorte qu’une accusation pour cette infraction ne pouvait être utilisée pour persécuter des opposants politiques. Elle limitait la suspension du mandat d’habeas corpus, excepté « lorsque, en cas de rébellion ou d'invasion, la sécurité publique l’exige ». Elle interdisait également les critères religieux pour l'obtention

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d'un poste fédéral.

La Constitution d’origine n’incluait pas de déclaration des droits parce que peu de délégués à l'Assemblée constitutionnelle considéraient cela nécessaire. Lorsque George Mason de Virginie en proposa une lors de la dernière semaine de l'Assemblée aucun État ne l’appuya. Cependant, durant la discussion sur la ratification de la Constitution, les opposants antifédéralistes à la ratification en déplorèrent l'absence, considérant qu’il s’agissait d’un défaut grave qui entraînerait l’expansion d'un gouvernement fédéral dangereusement puissant. En réponse, Hamilton insista sur le fait qu'une déclaration des droits augmenterait le pouvoir fédéral parce que celui-ci pourrait faire tout ce qui n’est pas interdit par une telle

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déclaration.Cependant, l’argument d’Hamilton ne persuada pas, et les fédéralistes, qui soutenaient la ratification, acceptèrent d’inclure des modifications en échange de la ratification.

La Déclaration des droits de 1791, soit les dix premiers amendements à la Constitution, reflète en partie les soucis des antifédéralistes. Parce que ceux-ci considéraient le gouvernement fédéral comme une menace importante à la liberté, les modifications n’imposèrent des limites qu’au gouvernement fédéral. La plupart des constitutions d'État contenaient déjà des déclarations des droits afin de se prémunir contre les violations de l'État; en fait, ces constitutions d'État furent la source de la plupart des droits dans la Déclaration fédérale des droits. D'ailleurs, quelques modifications protègent également des prérogatives étatiques. Par exemple, le Premier amendement interdit au Congrès de promulguer des lois concernant une institution religieuse, laissant de ce fait les États libres d’organiser les relations Église-État comme ils l’entendent; le Deuxième amendement protège le droit de porter une arme, permettant aux citoyens de se regrouper pour s'opposer à l'oppression fédérale, sous la conduite des États au besoin. Enfin, le Dixième amendement confirme que la Constitution n’accorde qu’un pouvoir limité au gouvernement fédéral et que toutes les compétences qui ne lui sont pas déléguées sont réservées aux États ou au peuple.

La Déclaration des droits reflète en outre le souci de préserver les droits individuels. Le Premier amendement protège les principales libertés, la liberté de religion, la liberté d’expression, la liberté de la presse, la liberté de réunion, et la liberté de faire des demandes au gouvernement au moyen de pétitions. Les Quatrième, Cinquième et Sixième amendements garantissent une panoplie de droits aux personnes accusées de crime par exemple, le droit à la protection contre les perquisitions et les saisies abusives, le droit à l'assistance d'un avocat, et le droit à la protection contre l’auto-incrimination. Les Sixième et Septième amendements garantissent le droit d'être jugé par un jury dans les affaires pénales et civiles fédérales. Le Huitième amendement interdit les cautions ou les amendes abusives et proscrit les « peines cruelles et inusitées ». Le Neuvième amendement confirme que la liste des droits dans les huit amendements précédents n'est pas complète, que « l'énumération dans la Constitution, de certains droits, ne doit pas être interprétée de façon à nier ou déprécier d'autres droits conservés par le peuple ».

Ce qui frappe, du moins à l’heure actuelle, c’est ce que la Déclaration des droits ne mentionne pas. Premièrement, elle ne prévoit pas la suspension des droits pour des raisons d’urgences nationales. Elle permet seulement la suspension du mandat d’habeas corpus en cas de rébellion ou d'invasion. Ainsi, la compétence de déterminer si la restriction des droits durant une guerre ou toute autre urgence est justifiée par les circonstances revient en grande partie au Congrès et au pouvoir judiciaire. En second lieu, la Déclaration des droits ne reconnaît pas de droits collectifs ou communautaires, et même les modifications subséquentes protégeant les membres de groupes ne les protègent qu'en tant qu'individus. Ainsi, le Quatorzième amendement protège « toute personne » (section 1) contre l’inégalité de traitement devant la loi, les Quinzième et Dix-neuvième amendements s'assurent qu'aucun citoyen ne soit privé du droit de vote en raison de sa race ou de sa couleur (Quinzième) ou encore de son sexe (Dix-neuvième). Troisièmement, la Déclaration des droits établit des droits négatifs sous forme de garanties contre l’oppression du gouvernement; elle ne protège pas les droits positifs, tels que les droits aux services gouvernementaux. Par exemple, quand les parties dans l’affaire San Antonio Independent School District c. Rodriguez (1973) insistèrent sur le fait que la

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Constitution garantit un droit à l'éducation, la Cour suprême rejeta leur argument.Quelques constitutions d'État protègent des droits positifs, comme le droit à l'éducation, à un environnement propre et sain, et au logement. Enfin, la Déclaration des droits n'offre aucune protection contre les violations des droits par des particuliers, protégeant uniquement les droits contre les violations par les gouvernements.

Trois événements ont changé radicalement la protection des droits dans le constitutionnalisme américain. Le premier facteur déclencheur fut l'adoption du Quatorzième amendement en 1868. Le but immédiat de cette modification constitutionnelle était de déterminer les droits des esclaves nouvellement libres contre les violations des États. Cependant, il n'y est pas fait mention de la race et les termes utilisés sont vagues. Il interdit aux États « d’édicter ou de mettre en application toute loi qui restreindrait les privilèges et les immunités de citoyens des États-Unis », il leur ordonne « d’assurer à toute personne se trouvant sur son territoire une protection égale devant la loi » et « de garantir à quiconque une procédure légale en cas d’atteinte à sa vie, à sa liberté ou à ses biens » (section 1). Les commentateurs et les juges furent en profond désaccord quant à la portée donnée au Quatorzième amendement. Quelques intellectuels insistent sur le fait que celui-ci applique la Déclaration des droits aux États, qu’il garantit d'autres droits contre la violation par les États, et qu’il confère au gouvernement fédéral un large

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pouvoir pour protéger ces droits.D'autres spécialistes soulignent l'attachement de ses auteurs au fédéralisme, décrivant ses objectifs comme spécifiques plutôt qu'évolutifs, et nient que ceux-ci sous-entendent l'application de la Déclaration des

droits aux États.47 Au départ, la Cour suprême interpréta le Quatorzième

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amendement de façon stricte dans The Slaughterhouse Cases (1873).Toutefois, au cours du vingtième siècle et en particulier durant la présidence d’Earl Warren (1953-69) la Cour lui conféra une portée plus large, et elle jugea de plus ou plus souvent que presque toutes les dispositions de la Déclaration des droits protégeaient contre les violations des droits tant par les États que par le gouvernement fédéral.

Ce qui se dégage implicitement de ce qui vient d’être dit constitue la seconde principale évolution, soit les prises de position plus vigoureuse de la Cour suprême dans l'application des droits. Jusqu’au début du vingtième siècle, la Cour n’avait jamais annulé une loi d’État en raison de violation de la Déclaration des droits. Cependant, avec l’extension de cette déclaration aux États, le nombre d’affaires impliquant des revendications des droits s'accrut considérablement, amenant la Cour à prononcer des jugements de principe. Parmi ceux-ci, on retrouve l'interdiction de brûler le drapeau en vertu du Premier amendement, la prohibition du soutien étatique des pratiques religieuses dans les écoles, le fait que le gouvernement doive fournir de l’assistance juridique gratuite aux accusés indigents, l’exigence que la police informe les prévenus de leurs droits avant d’être interrogés, et l’interdiction de la peine de mort pour les affaires de viol, tous ces cas concernant

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des violations de droits au niveau étatique plutôt qu’au niveau fédéral. En outre, la Cour suprême se fonde sur la clause de l’égalité de traitement du Quatorzième amendement pour traiter de la discrimination raciale (par exemple, Brown c. Board of Education, 1954), de la répartition des législatifs (par exemple, Reynolds c. Sims, 1964), et plus récemment, de la discrimination sexiste (par exemple, United States c. Virginia, 1996) et des mesures d’embauche discriminatoires (par exemple, Grutter c.

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Bollinger, 2003).En conclusion, la Cour a reconnu des droits que l’on ne retrouve pas expressément dans la Constitution, tels que le droit à la vie privée, et elle a ainsi annulé des lois d’État violant notamment le droit à l’avortement (par exemple, Roe c.

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Wade, 1973).

Au début des années 70, un autre fait important eut lieu, à savoir la résurgence des déclarations des droits des États. Les constitutions d'État ont toujours inclus des garanties. Cependant, pendant la majeure partie du vingtième siècle, les avocats n’y faisaient que rarement référence, préférant à la place se fonder sur la Déclaration fédérale des droits et s’adresser aux cours fédérales pour faire valoir les droits de leurs clients. Sous la présidence d’Earl Warren, la Cour suprême était très sensible aux revendications des droits. Après le départ de celui-ci en 1969, cependant, la Cour prit une direction plus modérée, en particulier dans les affaires impliquant les droits des accusés. Ceci amena de nombreux défenseurs des libertés civiles à porter des causes devant les cours d'État, en présentant des arguments juridiques basés sur les déclarations des droits des constitutions d’État. Ce « nouveau fédéralisme judiciaire » connut un succès considérable, et les cours d’État jouèrent un rôle significatif dans les affaires impliquant (entre autres) les droits des accusés, les droits des gais et des lesbiennes, et la réforme financière des écoles publiques. Ainsi, les avocats ont souvent tendance à tantôt choisir les cours d’État, tantôt les cours fédérales.

LES CHANGEMENTS CONSTITUTIONNELS

Les changements constitutionnels peuvent s’opérer soit en modifiant le texte du document par une modification ou une révision (remplacement) soit en changeant son interprétation. Les 50 États eurent principalement recours aux modifications et révisions constitutionnels. Mais le changement par interprétation fut prédominant en ce qui concerne la Constitution américaine. Les changements les plus importants de l'histoire constitutionnelle américaine soit l'expansion de l'envergure de tous les ordres de gouvernement, l'expansion du pouvoir fédéral, et la croissance des pouvoirs présidentiels et judiciaires ont été effectués en grande partie sans modification constitutionnelle.

La Constitution ne fut modifiée que 27 fois en l’espace de plus de 215 ans. Si l’on exclut la Déclaration des droits (soit les dix premiers Amendements) de 1791, elle fut modifiée moins d'une fois tous les 13 ans. La rareté de ces changements officiels reflète en partie les difficultés qu’occasionne une modification. Elle doit être proposée par une résolution adoptée par les deux tiers des voix dans chaque chambre du Congrès ou par une assemblée convoquée par le Congrès sur demande des deux tiers des législatifs d'État. (La dernière approche, qui visait à s’assurer que le Congrès ne puisse pas bloquer les demandes de changements constitutionnels venant de la population, n'a jamais été utilisée.) Bien que des milliers de modifications furent présentées au Congrès, seules 33 d’entre elles furent renvoyées aux États pour ratification. Pour être ratifiée, une modification doit être approuvée par les législatifs des trois quarts des États ou, si le Congrès le demande, par des assemblées spécialement élues dans les trois quarts des États. La procédure de ratification reflète ainsi le caractère fédéral de la politique américaine, en exigeant que les modifications constitutionnelles soient approuvées par les deux partenaires (fédéral et étatique) du système fédéral et soient appuyées non seulement par une

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majorité numérique, mais également par une majorité géographique.

NOUVELLES TENDANCES ET EVENEMENTS RECENTS

Il est fort peu probable que des modifications majeures soient adoptées dans la Constitution américaine dans un proche avenir. Par conséquent, les influences les plus importantes sur le développement du constitutionnalisme et du fédéralisme américain dans les premières décennies du vingt et unième siècle seront des changements dans l’interprétation de la Constitution ou des ajustements politiques dans les limites de la latitude laissée par la Constitution. Trois tendances appuient cette observation.

La première tendance concerne la Cour suprême, laquelle tend à préserver les prérogatives des États et à imposer des limites au pouvoir fédéral. Au début des années 90, elle réaffirma et développa le concept de l’immunité absolue des États. Elle jugea également que les institutions des gouvernements d'État (autres que les cours) ne peuvent pas être réquisitionnées par le Congrès pour l’aider à appliquer le droit fédéral. Elle fixa au Congrès certaines limites quant à l'utilisation de la disposition sur le commerce pour régir les activités non économiques. Enfin, elle imposa de nouvelles normes, relativement strictes, concernant la révision de lois du Congrès adoptées en vertu de la section 5 du Quatorzième amendement, lequel autorise le Congrès à édicter les « lois appropriées » pour mener à bien les objectifs de cet Amendement. Ces décisions furent souvent prises par une étroite majorité de 5 contre 4, et la longévité de ces avis judiciaires qui mettent en pratique le fédéralisme constitutionnel est susceptible de dépendre des futures nominations à la Cour suprême, lesquelles découleront à leur tour des résultats des futures élections présidentielles et sénatoriales.

La seconde tendance a pour objet la réticence du gouvernement fédéral à limiter ses activités dans les domaines de compétence concurrente afin de permettre aux États d'exercer leurs responsabilités traditionnelles en tant que gouvernement. Depuis les années 70, les présidents qui se sont succédé ont tous professé leur appui théorique à ce que la bride du gouvernement fédéral soit bien tenue, permettant de ce fait aux gouvernements d'État de tenter des approches novatrices en ce qui a trait à des enjeux politiques et d’adapter les politiques au contexte et aux besoins de

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leurs citoyens.Les spécialistes ont également redécouvert les vertus du

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fédéralisme.Néanmoins, la pratique politique n'a pas toujours coïncidé avec la théorie. Les présidents ont eu tendance à encourager les solutions centralisatrices pour régler les problèmes par exemple, les initiatives du président George W. Bush concernant l’enseignement primaire et secondaire et la réforme de la responsabilité civile et le Congrès a répondu aux pressions de groupes d’intérêt en fédéralisant une variété de crimes qui relevaient du droit des États, tels que la possession de drogue et la violence contre les femmes. La question de savoir si cette expansion fédérale peut être contenue sera importante pour déterminer l'orientation future du fédéralisme américain.

La dernière tendance est liée aux attaques terroristes sur les États-Unis du 11 septembre 2001 et à la réaction du gouvernement fédéral à celles-ci. Ces attaques ainsi que la guerre contre le terrorisme qui s’ensuivit ont axé l'attention du gouvernement fédéral sur les affaires étrangères et la sécurité intérieure et ont conduit à l'adoption de lois (par exemple, le « Patriot Act ») destinées à prévenir de futurs actes terroristes. Cette loi est controversée, comme le sont d'autres initiatives prises par le gouvernement fédéral, mais la polémique s'est surtout concentrée sur les atteintes portées aux libertés civiles plutôt que sur les menaces d’atteinte à l'équilibre fédéral. En réalité, la lutte contre le terrorisme n'a pas sensiblement changé le fédéralisme américain. La création du ministère américain de la sécurité intérieure au sein du gouvernement fédéral a impliqué une réorganisation importante de cette entité, mais n'a pas considérablement affecté les relations intergouvernementales. L'accent a été principalement mis sur l’amélioration de la coopération et de la coordination intergouvernementales plutôt que sur l’accélération de la centralisation. Ainsi, la réponse au 11 septembre s’est adaptée au système fédéral actuel.

NOTES

1Cette description du statut des tribus est tirée de l'opinion de John Marshall, président de la Cour dans l'affaire Worcester c. Georgia, 31 US (6 Pet.) 515 (1832).

2 Alexander Hamilton, John Jay et James Madison, The Federalist Papers, sous la direction de Clinton Rossiter (New York: New American Library, 1961), p. 74.

Toutes les références subséquentes aux « Federalist Papers » se rapportent à

cette édition.

3 Voir la célèbre discussion de James Madison dans The Federalist Papers, no 10, p.

45.

4 James Madison, The Federalist Papers, no 39, 214.

5 En droit constitutionnel américain, la « compétence liée aux services de police » consiste à protéger la santé, la sécurité, le bien-être et la moralité de l'ensemble des citoyens.

6 George Washington, « To the Hebrew Congregations of Philadelphia, New York, Charleston, and Richmond, December 1790 », The Writings of George Washington, vol. 31, sous la direction John C. Fitzpatrick (Washington, DC: US Government Printing Office, 1939), pp. 18586.

7 Constitution des États-Unis, article I, section 2, paragraphe 2, et section 3, paragraphe 3.

8 L’interdiction concernant les critères religieux figure dans la Constitution américaine, article IV, paragraphe 3.

9 James Madison, The Federalist Papers, no 10. Pour une analyse détaillée des arguments de Madison, voir David F. Epstein, The Political Theory of the Federalist (Chicago: University of Chicago Press, 1984).

10 Voir, par exemple, Michael F. Zuckert, « Completing the Constitution: The Fourteenth Amendment », Publius: The Journal of Federalism 22 (printemps 1992): 6992.

11 Voir, par exemple, Robert J. Kaczorowski, « To Begin the Nation Anew: Congress, Citizenship, and Civil Rights After the Civil War », American Historical Review 92 (février 1987): 4568.

12 Donald S. Lutz, « The United States Constitution as an Incomplete Text », Annals of the American Academy of Political and Social Sciences 496 (mars 1988): 2332.

13 Voir, par exemple, United States c. Lopez, 511 US 1029 (1995); Printz c. United States, 521 US 898 (1997); et United States c. Morrison, 529 US 598 (2000).

14 Constitution des États-Unis, article IV, section 3, paragraphe 1.

15 Constitution des États-Unis, article IV, section 4, et article IV, section 2.

16 Voir David E. Wilkins, American Indian Sovereignty and the US Supreme Court: The Masking of Justice (Austin: University of Texas Press, 1997).

17 Alexander Hamilton, The Federalist Papers, no 32, p. 166.

18 Voir, par exemple, Seminole Tribe of Florida c. Florida, 517 US 44 (1996); et Federal Maritime Commission c. South Carolina State Ports Authority, 535 US 743 (2002).

19 Voir, par exemple, New York c. United States, 505 US 144 (1992); et Printz c. United States, 521 US 898 (1997).

20 John Kincaid, « From Dual to Coercive Federalism in American Intergovernmental Relations », Globalization and Decentralization, sous la direction de John S. Jun et Deil S. Wright (Washington, DC: Georgetown University Press, 1996), pp. 2947; John Kincaid, « From Cooperation to Coercion in American Federalism: Housing, Fragmentation, and Preemption, 17801992 », Journal of Law and Politics 9 (Hiver 1993): 333433; US Advisory Commission on Intergovernmental Relations, Federal Statutory Preemption of State and Local Authority: History, Inventory, and Issues (Washington, DC: US ACIR, 1992); US Advisory Commission on Intergovernmental Relations, Regulatory Federalism: Policy, Process, Impact, and Reform (Washington, DC: US Government Printing Office, 1984); et Thomas J. Maroney, « Fifty Years of Federalization of Criminal Law: Sounding the Alarm or ‘Crying Wolf », Syracuse Law Review 50 (2000): 131778.

21 James Madison, The Federalist Papers, no 47, p. 269.

22 Wesberry c. Sanders, 376 US 1 (1964).

23 Garcia c. San Antonio Metropolitan Transit Authority, 469 US 528 (1995).

24 Marbury c. Madison, 5 US (1 Cranch) 137 (1803).

25 James Madison, The Federalist Papers, no 37, p. 195.

26 Constitution des États-Unis, article I, section 10, paragraphe 3.27 Pollock c. Farmers’ Loan & Trust Co., 157 US 429 (1895). 28 McCulloch c. Maryland, 17 US (4 Wheat.) 316 (1819). 29 Constitution de la Pennsylvanie, article XI, section 1.30 Constitution de la Californie, article XIIIA, et Constitution du Colorado, article 10,

section 20.

31 South Dakota c. Dole, 483 US 203 (1987).

32 James Madison, The Federalist Papers, no 42, p. 232.

33 American Insurance Association c. Garamendi, no 02-722 (2003).

34 Crosby c. National Foreign Trade Council, 530 US 363 (2000).

35 James Madison, The Federalist Papers, no 46, 267.

36 Perpich c. Department of Defense, 496 US 334 (1990).

37 Dred Scott c. Sandford, 60 US (19 How.) 393 (1857).

38 Chirac c. Chirac, 15 US (2 Wheat.) 259 (1817).

39 Voir « American Civil Liberties Union », The Rights of Aliens and Refugees: The Basic ACLUGuide to Alien and Refugee Rights, 2e éd. (Carbondale, IL: Southern Illinois University Press, 1990); et Gerald L. Neuman, Strangers to the Constitution: Immigrants, Borders, and Fundamental Law (Princeton, NJ: Princeton University Press, 1996).

40 Constitution des États-Unis, article I, section 2, paragraphe 1.

41 La Loi sur l'inscription nationale des électeurs de 1993, également connue sous le nom de « motor voter », exige que les États fassent le nécessaire afin d’inscrire leurs résidants sur leurs listes électorales lorsque ceux-ci demandent ou remplacent un permis de conduire.

42 Buckley c. Valeo, 424 US 1 (1976). 43 Constitution des États-Unis, article I, section 9, paragraphes 2 et 3; article III,

section 3, paragraphe 1; et article IV, section 3.

44 Alexander Hamilton, The Federalist Papers, no 84.

45 San Antonio Independent School District c. Rodriguez, 411 US 1 (1973).

46 Voir, par exemple, Michael Kent Curtis, No State Shall Abridge: The Fourteenth

Amendment and the Bill of Rights (Durham, NC: Duke University Press, 1986). 47 Voir, par exemple, Raoul Berger, Government by Judiciary: The Transformation of

the Fourteenth Amendment (Cambridge, MA: Harvard University Press, 1977).

48 The Slaughterhouse Cases, 83 US (16 Wallace) 36 (1873).

49 Texas c. Johnson, 491 US 397 (1989); School District of Abington Township c.

Schempp, 374 US 203 (1963); Gideon c. Wainwright, 372 US 335 (1963); Miranda

c. Arizona, 384 US 436 (1966); Coker c. Georgia, 433 US 584 (1977).

50 Brown c. Board of Education of Topeka, 347 US 483 (1954); Reynolds c. Sims, 377 US 533 (1964); United States c. Virginia, 518 US 515 (1996); Grutter c. Bollinger, 02241 (2003).

51 Roe c. Wade, 410 US 113 (1973).

52 Constitution des États-Unis, article V.

53 Timothy M. Conlan, From New Federalism to Devolution: Twenty-five Years of Intergovernmental Reform (Washington, DC: The Brookings Institution, 1998); et David B. Walker, Slouching Toward Washington: The Rebirth of Federalism (Chatham, NJ: Chatham House, 1995).

54 Voir, par exemple, Alice M. Rivlin, Reviving the American Dream: The Economy, the States, and the Federal Government (Washington, DC: The Brookings Institution, 1992).